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La flotte de Napoléon III - Documents
Histoire
Voyage de Maximilien
Le voyage de Maximilien, empereur du Mexique, vers le Mexique en 1864,
vu par le peintre Henri Zuber
Nous
présentons
ici
un
extrait
de
l'article
de
François
Pétry,
"
Le
voyage
de
Maximilien,
empereur
du
Mexique,
vers
le
Mexique
en 1864, vu par le peintre Henri Zuber", paru dans la Revue d'Alsace , N°138, 2012, p. 127-154.
Les lecteurs intéressés pourront se reporter avec profit à l'article complet paru dans la revue (
http://www.alsace-histoire.org/
).
...]
Bien
que
des
études
anciennes
et
une
monographie
récente
lui
aient
été
consacrées,
Henri
Zuber
reste
un
peintre
encore
relativement
méconnu,
à
tort,
car
il
se
révèle
fort
intéressant.
Son
grand-père
est
le
fondateur
de
la
manufacture
fameuse
de
papiers-peints
de
Rixheim
en
Haute-Alsace.
Né
en
1844,
Henri
Zuber
fit
d’abord
sa
scolarité
en
Suisse
alémanique,
puis
on
le
retrouve à Strasbourg et, ensuite, apparemment, à Paris (préparation de Navale ?).
Il
semble
avoir
dessiné
très
tôt.
Au
tout
début
des
années
60,
il
est
à
Brest
où
il
fait
la
connaissance
du
peintre
de
marine
Etienne
Mayer,
dont
il
suit
des
cours
pendant
deux
ans.
Henri
Zuber
acquiert,
là,
un
incontestable
métier
(bon
apprentissage
de
peintre
de
marine),
ce
qui
s’observe
ensuite
dans
le
détail
du
dessin
des
bateaux
ou
des
ambiances
portuaires.
A
Brest,
il
fait
principalement
ses
études
à
l’Ecole
Navale
dont
il
sort
en
bon
rang
(14e
sur
66)
et
il
sert,
à
sa
sortie,
comme
aspirant
de
marine
sur le « Montebello ».
Peu
après,
au
début
de
1864,
il
est
attaché
à
la
frégate
«
La
Thémis
»
qui
est
précisément
le
bateau
d’escorte
que
l’empereur
Napoléon
III
va
mettre
à
la
disposition
de
Maximilien
Ier
du
Mexique
pour
le
voyage
de
Trieste
au
Mexique.
C’est
au
cours
de
cette
mission
que
Henri
Zuber,
à
peine
âgé
de
20
ans,
réalise
une
importante
série
de
dessins
qui
rendent
compte
de
ce
voyage
maritime – de ses diverses escales notamment - vers le Mexique.'contactrestaurantlombriere'
Concernant
ce
voyage
effectué
par
Henri
Zuber,
les
informations
publiées
jusqu’ici
sur
ce
voyage
sont
brèves.
On
sait
ainsi,
par
un
tableau
biographique
affiché
sur
le
site
de
l’Association
Henri
Zuber,
que
lors
du
voyage
de
la
«
Thémis
»,
Henri
Zuber
réalise
de
«
premiers
croquis
et
esquisses
d’Italie
».
Egalement
qu’il
«
illustre
son
journal
de
bord
de
nombreux
croquis,
esquisses
et
caricatures
»
(mais
cette
dernière
information
semble
valable
surtout
pour
le
voyage
suivant
qui
le
mène
en
Extrême-Orient).
Henri
Zuber
écrit
de
longues
lettres
à
sa
mère
notamment
(toujours
pendant
le
voyage
en
Extrême-Orient),
si
des
lettres
similaires
existent
pour
le
voyage
vers
le
Mexique,
elles
pourraient
constituer
une
source
supplémentaire
fort
intéressante.
Il
est
vraisemblable que d’autres sources, portant sur ce premier voyage maritime important, sont encore à exploiter.
Gibraltar.
Au
premier
plan,
un
pe
u
à
droite
et
à
quelque
distance
du
port
principal,
la
«
Novara
»
battant
pavillon
mexicain.
(c)
(coll.
François Pétry).
Un
ensemble
de
dessins
du
voyage
de
Henri
Zuber
à
bord
de
la
«
Thémis
»
a
refait
surface
chez
un
marchand
strasbourgeois.Il
comprend
27
feuilles
(et
28
dessins).
Ces
feuilles
étaient
détachées
d’un
carnet
à
dessin
au
moins
;
il
n’est
pas
exclu
qu’il
y
ait
eu
un
secondcalepin
(vraisemblablement
existe-t-il
encore
d’autres
dessins chez des descendants de Henri Zuber.
Les
dimensions
de
ces
dessins
sont
en
général
de
16,8
x
26,2
cm
;
trois
dessins
sont
sur
des
papiers
plus
blancs
(N°
1,
6
et
27,
ce
dernier
étant
un
peu
raccourci).
Les
dessins
sont
majoritairement
faits
au
crayon
à
papier,
avec
des
appoints
de
crayons
de
couleurs
parfois
très
discrets,
rarement
plus
soutenus.
Dans
quelques
cas,
Zuber
a
rajouté
des
rehauts
blancs,
par
exemple
à
la
gouache
(ces
rehauts
ont
souvent
viré).
L’ordre
de
ces
dessins,
au
moment
de
la
découverte,
était
peu
cohérent
:
l’Italie
alternait
avec
les
Caraïbes, puis on revenait à Venise ou Trieste.
Un
dessin
seulement
est
signé
(N°
3
de
l’ordre
reconstitué,
voir
Annexe)
et
seuls
deux
dessins
sont
datés
(N°1
et
27).
Les
titres
permettaient
de
retrouver
un
certain
ordre
géographique,
mais
9
dessins
n’étaient
pas
intitulés,
dont
l’un
des
dessins
majeurs,
consacré
au
départ
de
Miramar
!
(N°6
de
l’Annexe).Le
nom
de
Zuber
puis
l’identification
du
château
de
Miramar
ont
ensuite
éclairé
tout
l’ensemble
:
un
ordre
à
peu
près
logique
a
pu
être
établi,
mais
l’éclaircissement
majeur
est
venu
de
la
lecture
du
journal de voyage de la comtesse Kollonitz (1).
Les
premiers
dessins
(N°1
à
5)
sont
en
quelque
sorte
antérieurs
à
la
prise
de
plume
de
Paula
Kollonitz.
La
frégate
«
La
Thémis
»
se
trouve
en
février
dans
la
rade
de
Villefranche-sur-Mer
qui
est
le
port
d’attache
principal
de
la
marine
impériale,
c’est
de
là
que
cette
frégate
prend
la
mer
pour
rejoindre
Trieste.
La
frégate
traverse
le
détroit
de
Messine
et
remonte
vers
le
golfe
de
Trieste.
Elle
fait
visiblement
escale
à
Venise
qui
est
à
peine
à
100
miles
marins
de
Trieste
pendant
que
Maximilien
effectuait
encore
ses
préparatifs dans son château de Miramar près de Trieste.
Les
dessins
de
Henri
Zuber
documentent
le
voyage
de
la
«
Thémis
»
depuis
le
départ
de
Villefranche.
A
une
vue
de
Villefranche,
succède
une
vue
de
volcan
en
pleine
mer
(que
Zuber
intitule,
à
tort,
Le
Mont
Etna,
alors
qu’il
s’agit
certainement
du
Stromboli
dans
les
îles
éoliennes
ou
Lipari).
Au
moment
de
l’escale
(probablement
de
plusieurs
jours)
à
Venise,
Henri
Zuber
visite
la
ville
et
fait
plusieurs
dessins.
A
partir
de
l’arrivée
à
Miramar,
les
deux
témoignages,
celui
de
la
comtesse
Kollonitz
et
celui
de
Henri
Zuber
marchent en quelque sorte en parallèle et les deux contributions vont constituer comme les deux voix d’une même partition.
Il
est
possible
que
la
comtesse
Kollonitz
n’ait
pas
prêté
grande
attention
au
jeune
officier
de
marine
français,
le
seul
officier
français
qu’elle
cite
est
le
commandant
Morier.
Cependant,
Henri
Zuber
étant
certainement
germanophone,
il
a
très
probablement
été
conduit
à
jouer
un
rôle
dans
les
contacts
entre
la
«
Thémis
»
et
la
«
Novara
»
;
peut-être
même
était-il
une
forme
d’officier
de
liaison
entre
le
commandant
Morier
qui
commandait
la
«
Thémis
»
(et
était
bien
connu
de
Paula
Kollonitz)
et
le
commandement
de
la
«
Novara
»,
sinon
même
avec
la
suite
impériale ?
S.T.
L’embarquement
de
la
suite
de
Maximilien,
le
14
avril
1864.
depuis
la
«
Thémis
».
Foule
devant
le
château
de
Miramar
assistant
à
l’embarquement
:
Maximilien
est
installé
sur
la
barque
décorée,
vers
la
gauche
;
il
se
dirige
vers
la
«
Novara
»
au
centre
;
canonnade
de
départ,
la
«
Bellona
»(à
peine
esquissée)
est
cachée
par
la
fumée
dégagée
par
les
tirs
de
canons.
Zuber
voit
cette
scène
depuis
le
pont
de
la
«
Thémis
».
-
(c)
(coll. François Pétry).
Si
un
assez
grand
nombre
de
personnes
ont
pu
se
trouver
quelquefois
dans
le
cortège
impérial
(à
Funchal,
à
la
Martinique
notamment),
des
représentants
de
la
«
Thémis
»
–
donc
Henri
Zuber
–
étaient
certainement
très
présents
lorsqu’une
partie
de
cette
suite
débarque
à
la
Martinique,
terre
française,
à
l’occasion
de
réceptions
et
d’une
excursion
à
l’intérieur
des
terres.
Mais
la
place
de
Henri
Zuber
était
principalement
à
bord
de
la
«
Thémis
»
qui
naviguait
aux
côtés
de
la
«
Novara
»
:
à
diverses
reprises,
d’après
ses
dessins,
Zuber
représente
ainsi
la
«
Novara
»
vue
certainement
depuis
le
pont
de
la
Thémis,
ainsi
au
départ
de
Miramar ou à l’escale de Gibraltar, ou encore voguant au milieu des îles éoliennes.
A
partir
du
départ
de
Miramar-Trieste,
les
dessins
de
Zuber
et
le
texte
de
l’ouvrage
de
la
comtesse
Kollonitz
sont
en
quelque
sorte
en
résonance
permanente,
cette
concordance
est
soulignée
dans
les
légendes
détaillées
de
l’Annexe.
La
petite
flottille
contourne
le
sud
de
l’Italie,
passe
par
le
détroit
de
Messine
et
va
faire
escale
à
Civita-Vecchia.
Paula
Kollonitz
rend
compte
de
façon
assez
détaillée
de
la
partie
audiences
et
réceptions
officielles
qui
marquent,
à
Rome,
le
départ
de
Maximilien
pour
le
Mexique
;
elle
visite aussi le Colisée, les ruines du Forum romain.
De
son
côté,
Henri
Zuber
avait
dessiné
le
passage
de
la
«
Novara
»
devant
les
îles
Lipari
et
croqué
quelques
vues
de
la
Campagne
romaine
et,
à
Rome,
le
Colisée
et
le
Forum…
La
flottille
reprend
la
mer
au
bout
de
quelques
jours,
passe
par
le
détroit
de
Bonifacio
selon
les
indications
de
Paula
Kollonitz,
puis
longe
la
côte
orientale
de
l’Espagne
avant
de
faire
escale
à
Gibraltar
:
Zuber
représente
la
côte
d’Alicante
(deux
dessins),
puis
la
«
Novara
»
à
l’ancre
à
Gibraltar.
Avant
la
grande
traversée
de
l’Atlantique,
une
halte
est
encore
marquée
à
Funchal,
capitale
de
l’île
portugaise
de
Madère,
île
bien
connue
des
Habsbourg
:
Zuber
montre
l’approche
de
l’île
(deux
vues
dont
une
vue
générale
de
Funchal),
puis
il
décrit
deux
villas,
entourées
de
végétation
tropicale,
l’une
en
particulier
est
bien
inscrite
dans
le
paysage
montagneux
;
pour
sa
part,
la
comtesse
Kollonitz
narre
assez
longuement
une visite à Funchal où deux villas sont visitées et s’extasie sur le foisonnement de la végétation.
La
traversée
n’est,
pour
le
moment,
connue
que
par
l’ouvrage
de
la
comtesse
:
elle
parle
des
difficultés
de
la
navigation
dans
la
zone
des
alizés,
du
ralentissement
(le
bateau
se
trouva
encalminé
dans
le
«
pot-au-noir
»)
et,
en
conséquence,
des
fortes
difficultés
de
la
«
Novara
»,
bloquée
par
l’absence
des
vents
et
surtout
par
l’insuffisance
des
réserves
de
charbon
à
bord.
Il
se
joue
ensuite
un
épisode
assez
singulier
:
la
«
Thémis
»,
plus
grande
et
bien
mieux
pourvue
en
réserves
de
charbon,
va
être
contrainte
de
remorquer
la
«
Novara
»
jusqu’aux
approches
des
Antilles…
Cet
épisode,
semblant
porter
atteinte
aux
fiertés
nationales
respectives,
est
donc
mal
vécu
des
deux
côtés
:
les
Autrichiens
et
Mexicains
à
bord
de
la
«
Novara
»
voient
le
navire
impérial
assez
peu
glorieusement
tracté
par
un
bateau
étranger…
;
les
Français,
contraints
de
réaliser
ce
remorquage,
sont
furieux,
car
leur
bateau
est
une
frégate
de
guerre
et
non
un
vulgaire remorqueur...
Lipari
Basiluzza
Panarea
Salina.
Henri
Zuber,
installé
à
la
poupe,
dessine
la
«
Novara
»
(de
face),
passant
devant
les
îlots
rocheux
des
Lipari. - (c) (coll. François Pétri).
Une
fois
les
vents
retrouvés,
la
«
Thémis
»
a
pris
un
peu
d’avance
pour
faire
préparer,
à
Fort-de-France,
des
réserves
de
charbon
destinées
à
la
«
Novara
».
Avec
une
vue
d’une
petite
installation
technique
probablement
en
bord
de
mer,
nous
retrouvons
Zuber
dessinant
à
la
Martinique
;
il
figure
également
deux
vues
de
la
forêt
vierge,
ces
dernières
correspondant
à
la
description
d’une
excursion
dans la jungle martiniquaise que fait la comtesse Kollonitz.
Avant
l’arrivée
à
Veracruz,
une
dernière
escale
a
lieu
encore
en
Jamaïque,
à
Port-Royal
dont
témoignent
la
comtesse
et
le
dessinateur.
L’arrivée
à
Veracruz
marque
pour
la
«
Thémis
»
-
et
Zuber
–
la
fin
de
la
mission
d’escorte.
Il
y
a
lieu
de
reconnaître
une
rue
de
Veracruz
dans
l’avant-dernier
dessin
de
Zuber
;
la
comtesse
a
laissé
une
vision
assez
sombre
de
cette
ville,
installée
dans
un
marécage,
où
règnent
des
odeurs
fétides
et
où
sévit
la
fièvre
jaune.
Les
chemins
des
deux
témoins
de
ce
voyage
se
séparent
:
la
suite
de
l’Impératrice
qui
relevait
toujours
de
la
Maison
d’Autriche
aurait
dû
s’arrêter
également
à
Veracruz
et
revenir
en
Europe,
mais
ce
ne
fut
pas
le
cas
(cf.
plus
haut)
;
en
contrepartie,
la
«
Thémis
»
repartit
et
elle
fit
encore,
selon
un
dernier dessin de Zuber, escale assez longuement à la Martinique où elle se trouve encore en juillet 1864.
La
comtesse,
revenue
en
Autriche,
prendra
le
temps
de
mettre
au
net
son
journal
de
voyage,
de
trouver
un
éditeur
et
sa
"
Reise
nach
Mexico
im
Jahre
1864
"
va
paraître
bien
avant
l’exécution
de
Maximilien,
le
retentissement
de
l’ouvrage
est
tel
qu’une
seconde
édition
étoffée
de
peu
et
au
tirage
certainement
bien
plus
important
(c’est
habituellement
celle-ci
que
l’on
trouve)
est
tirée
par
l’éditeur
viennois
;
puis
l’ouvrage
est
traduit
en
diverses
langues.
En
contrepartie,
les
dessins
de
Zuber
devaient
tomber
dans un oubli quasi-total.
François Petry
note
1
:
la
comtesse
Kollonitz,
dame
de
la
Maison
d’Autriche,
faisait
partie
de
la
suite
de
l’impératrice
Charlotte.
Elle
a
publié
:
Eine
Reise
nach
Mexico
im
Jahre
1864
/
«
Un
Voyage
vers
le
Mexique
au
cours
de
l’année
1864
»,
qui
connut
un
succès
extraordinaire, il devait être traduit aussitôt dans de nombreuses langues… à l’exclusion du français.